Le blanchon
Je dédie cet article à mon neveu T.
Le bébé phoque du Groenland grossit de 2,5 kilos par jour!
Ses pleurs ressemblent à ceux des bébés humains
Le bébé phoque a un regard émouvant. Ce qui ne l'a pas empêché, autrefois, d'être massacré pour sa magnifique fourrure blanche tant convoités par les chasseurs. Heureusement, depuis 1989, la chasse aux blanchons est interdite. Il peut enfn grandit tranquillement sur sa banquise...tout au moins jusqu'au sevrage.
Quatre heures à grelotter
En quelques secondes, le petit passe de la température du corps maternel de 37°C à un environnement où la température affiche entre -15°C et +5°C. Sans compter le vent glacial qui souffle. De plus, le malheureux blanchon n'a pas encore la couche de lard des phoques plus âgés pour l'isoler, et le liquide amniotique qui le recouvre, donnant à son poil une teinte jaunâtre, se cristallise avec le froid. Le bébé phoque va donc grelotter trois ou quatre heures, le temps que son pelage soit totalement sec et isolant. Ses tremblements finissent par engendrer une chaleur interne et le réchauffer peu à peu. Malheureusement, en cas de pluie, ne pouvant pas sécher sa fourrure, le blanchon risque de mourir de froid.
Un lait très riche
Deux heures à peine après sa naissance, bébé phoque tête goulûment le bon lait maternel. Celui-ci est très riche: il contient 25% de matières grasses au début de l'allaitement et 40% à la fin (le lait de vache, par exemple, n'en contient que 5%). Grâce à cette nourriture, le jeune phoque grossit vite: pendant la période de lactation, qui dure une bonne semaine, il prend jusqu'à 2,5 kg par jour. Si bien qu'à la fin de son sevrage, vers 2 mois, il est passé de 10 kg, poids de sa naissance, à environ 40 kg et il a une couche de lard plus épaisse que celle des adultes. Elle lui sera bien utile pour résister au froid.
Des yeux bleus d'abord
Fin février, de retour sur les glaces flottantes du sud de l'Arctique, la future maman est prêt à accoucher. En quelques minutes, elle donne naissance à une grosse boule de poils blancs soyeux, bouclés et toute mouillés, avec de grands yeux bleus qui deviendront marront au bout de quelques jours. L'éclatante blancheur de sa fourrure a valu au bébé phoque l'appellation de blanchon.
Halte au massacre des bébés phoques
Dans les années soixante-dix, les tueries de bébés phoques sur la banquise ont ému l'opinion internationale, et de nombreuses associations de protection de la nature ont mené des campagnes contre ces massacres. Grâce à leurs efforts et à la pression du public, le commercialisation des peaux de blanchons fut presque totalement proscrite. A la fin de l'année 1988, le Canada en interdit la chasse. Cependant, la loi autorise, avec des quotas, les tueries des jeunes qui sont sevrés et des adultes.
Malheureusement, la Norvège a annoncé qu'elle reprendrait la chasse aux bébés phoques dès l'année 1995.
L'apprentissage de la nage est un vrai calvaire car le blanchon n'aime pas...l'eau! Pour l'encourager, sa mère lui caresse le bout du museau et l'invite à la suivre. Mais ce n'est pas sans appréhension que bébé phoque finit par piquer une tête dans l'élément liquide. La première peur passée, le jeune n'hésite pas à plonger sans toutefois oser s'aventurer dans les profondeurs. Et pour remonter sur la banquise, il se hisse de toutes ses forces en s'agrippant avec ses longues griffes.
Non-assistance
La mère quitte parfois son petit pour aller à la mer, qu'elle rejoint en passant par des cheminées restées ouvertes dans la glace. Au moindre danger, le blanchon resté seul s'immobilise. Sa mère vient rarement à son secours, surtout si elle est dans l'eau et se sent elle-même menacée. Si elle se trouve sur la banquise, il arrive qu'elle le défende, mais le plus souvent elle prend la fuite ou se fige à son tour.
L'heure de l'indépendance
Aussitôt sevré, bébé phoque est abandonné par sa mère. Désormais, il devra se débrouller seul. Les jeunes se regroupent alors entre eux et se serrent les uns contre les autres en poussant des cris de détresse qui rappellent les pleurs des bébés humains. Pendant de longues heures, les blanchons pleurent. Puis ils finissent par oublier leur chagrin et passent leurs journées à jouer sur la glace.
L'apprentissage de la vie
L'époque du sevrage coïncide avec la première mue. Pendant toute le temps qu'elle dure, le blanchon, privé de sa fourrure protectrice, est obligé de rester sur la banquise et condamné à un jeûne forcé. Heureusement, il a des réserves de graisse qui lui permettent de résister. La mue terminée, le jeune phoque a bien perdu une dizaine de kilos. Aussi s'empresse-t-il de plonger à la recherche de quelques proies à se mettre sous la dent. Mais sa mère ne lui a pas appris à chasser, et il doit se contenter de minucules crustacés planctoniques vivant à la surface. A 1 an, plus sûr de lui, il ose s'aventurer près des fonds marins pour y chasser son mets favori: les capelans.
Comme un loqueteux
A sa première mue, cette adorabe peluche perd par touffes son joli pelage de laine, appelé lunago. Le blanchon ressemble alors à un loqueteux en haillons. On appelle d'ailleurs cette période "la phase mitée", parce qu'on croirait sa fourrure mangée par les mites. Mais, à la fin de la mue, il a revêtu une superbe robe gris acier parsemée de tache sombres, aux poils plus courts et totalement imperméables. Ensuite, tous les ans, il mue et son pelage change plusieurs fois de teinte. Mais il lui faut attendre de nombreuses années avant d'avoir sa couleur définitive avec la fameuse tache en forme de lyre sur le dos, caractéristique de l'espèce.