La métamorphose des insectes
Deux corps en une seule vie
La larve et l'insecte d'une même espèce sont parfois si différents qu'il est difficile de croire qu'il s'agit bien du même animal. L'adulte est une larve métamorposée, bouleversée dans son anatomie.
Pendant longtemps, l'homme a cru que la viande avariée fabriquait les asticots. Il a pris ces vers blancs pour des animaux différents des mouches. De même, il est difficile d'imaginer qu'une chenille velue puisse se tranformer en un magnifique papillon. Pourtant, cette métamorphose concerne tous les insectes.
Pour parvenir au stade adulte, la grenouille, comme les insectes, se métamorphose : elle nait tétard et vit dans l'eau, avant de se doter de pattes et de respirer l'air libre.
Grandir dans une boîte
Les insectes, merveilleuse machines articulées, sont emprisonnés dans leur corps. Celui-ci est une sorte de boîte à la paroi épaisse, faite d'une protéine appelée chitine - que l'on retrouve dans nos cheveux. Pour croître, l'insecte doit donc régulièrement détruire cette armure avant d'en ajuster une autre à sa nouvelle taille : il lui faut donc muer. La larve (ou jeune) change peu entre chacune de ses nombreuses mues, et ce n'est qu'au cours de la dernière qu'elle devient vraiment un adulte.C'est la métamorphose, plus ou moins radicales selon les espèces.
La nymphe est un stade de mue caractéristique de différents insectes dont les abeilles.
Transformation progressive...
Les larves des sauterelles et des grillons vivent aux mêmes endroits que les adultes et se nourrissent de la même manière qu'eux. Elles muent quatre ou cinq fois avant de se métamorphoser. Leur développement est très progressif : d'abord les yeux et les antennes, puis les ébauches des ailes, qui grandissent à chaque mue. Les jeunes des punaises subissent la même évolution. Leurs ailes n'apparaissent qu'au quatrième stade. Après cinq mues, ils ressemblent de plus en plus aux adultes
Larve punaise verte
Punaise verte
Larve de sauterelle
Sauterelle
...ou radicale
Pour les éphémères et les libellules, la vie de la larve est tout autre. Elle ne ressemble en rien à l'adulte et ne vit pas dans les mêmes habitats. La métamorphose de la libellule est spectaculaire : l'insecte est aérien, alors que sa larve est aquatique. Dans l'eau, celle-ci est connue pour sa voracité : sa lèvre inférieure, modifiée en un "masque" affreux, est capable de se déployer pour attraper de petits poissons! Après une dizaine de mues et un peu moins d'un an passé dans l'eau, le jeune cesse de manger : il se transforme. Mais vu de l'extérieur, rien ne laisse deviner ce qui s'opère à l'intérieur de sa "boîte" rigide. Enfin, il sort de l'eau et s'accroche à une feuille. Sa carapace se fendille sur le dos. L'adulte en sort, tête la première. Puis en se pliant en deux, il extirpe son thorax de sa gangue, et enfin ses pattes et ses ailes. La tête en bas, à l'envers par rapport à son ancien corps, il attend que ses pattes lui donnent l'impulsion nécessaire pour se retourner. Il peut alors se poser, à l'endroit, sur ce qu'il était, afin d'extraire son abdomen. A bout d'une heure, sous l'effet de la pression sanguine, les ailes se sont déployées et l'abdomen s'est tendu. La libellule peut s'envoler pour sa vie d'adulte, plus courte que sa vie larvaire. Elle laisse quelque part son ancien corps qui, sous le nom d'exuvie, n'attend plus que d'être emporté par le vent.
Larve d'héphémère
Héphémère
Larve de libellule
Libellule
La nymphe, un stade de plus
Les coléoptères, les mouches, les moustiques, les abeilles, les puces, les fourmis et les papillons connaissent un stade de mue intermédiaire, la nymphe. Prodigieusement complexe, celle-ci vient s'intercaler entre le dernier stade larvaire et la mue ultime qui donne l'adulte. La nymphe est, en fait, un stade de repos : la larve s'emballe dans une coque où son corps subit un remaniement presque total, déjà engagé au cours du précédent stade larvaire. Chez tous ces insectes, la métamorphose est, à terme, complète : les larves ne ressemblent pas du tout aux adultes. Elle est aussi et surtout terminale : à chaque mue, les larves ont changé de taille, rien de plus; il faut vraiment attendre la dernière pour constater un changement.
Et quel changement! Regardez le fourmilion. L'adulte ressemble à une libellule qui volerait, lentement, de nuit. Alors que la larve possède un gros abdomen qu'à du mal à porter un tout petit thorax mu par trois paires de pattes. Au bout, une tête équipée d'impressionnantes mandibules. Enfouie au fond d'un trou creusé en entonnoir, patiemment, la larve du fourmilion attend qu'une fourmi étourdie lui tombe dessus. Aussitôt saisi, l'insecte est dépeçé et avalé.
L'anax empereur adulte est capable de voler une journée entière sans se poser.
L'anax empereur est l'un des plus grands insecte d'Europe (une dizaine de centimètres) et un redoutable prédateurs des eaux courantes.
Larve de fourmilion
Fourmillion
Un maillot de soie : la chrysalide
Les larves des papillons de jour et de nuit sont des chenilles qui se déplacent sur cinq paires de fausses pattes abdominales et trois paires de vraies pattes thoraciques. Après trois ou quatre mues, elles s'emmaillotent dans une nymphe appelée chrysalide. C'est une coque qui peut être constituée de fils de soie comme chez le ver de soie ou bombyx. Les larves des phryganes produisent aussi de la soie, mais seulement pour garnir leur abri. Certaines ressembles à des chenilles, d'autres ont des pattes. La plupart s'emballent dans un fourreau de soie sur lequel s'agrègent des débris végétaux et de petits cailloux. Ainsi protégée et alourdie, la larve de phrygane peut tenter d'échapper aux truites et de résister au courant des torrents où elle vit. Après cinq à sept mues, elle ferme son fourreau et devient nymphe. Bientôt métamorphosée, elle en sort pour se transformer en adulte à la surface de l'eau. C'est alors un nouvel insecte, proche des papillons, aux antennes démesurées et adapté à le vie nocturne.
Chenille du bombyx du murier
Cocon
Bombyx
Larve de phrygane
Phrygane
Les asticots, des larves sans pattes
Et les asticots? Après les larves à pattes, les larves à fausses pattes (chenilles), voici les larves sans pattes. Il n'y a que les diptères - qui regroupe les mouches et les moustiques - pour donner de telles larves. Certaines ont une belle tête (chez les moustiques), d'autres n'en ont pas (chez les mouches)! Mais toutes, après quatre ou huit mues (respectivement chez le moustique et chez la mouche), s'enferment dans leur dernière exuvie.
Appellée pupe, celle-ci est d'apect peu engageant; c'est elle qui abrite leur métamorphose. Pour sortir de la pupe, l'adulte va la faire éclater en gonflant une poche sur sa tête. Il conservera de cette sortie explosive une légère déformation en U à la base des antennes.
Si le phénomène de la métamorphose n'est pas propres aux insectes - les larves des invertébrés marins, les tétards des amphibiens et même les alevins des poissons plats en connaissent une -, ceux-ci sont les seuls à se transformer aussi radicalement, et parfois totalement, à la fin d'un processus long et répétitif.
Les larves des moustiques respirent à la surface de l'eau au niveau de l'anus, grâce à un siphon respiratoire.
Moustique
Larve de mouche
Mouche
La curieuse métamorphose du poisson plat
Les larves des poissons plats (plies, sole, turbot...) ont l'air de poissons "normaux", avec un corps symétrique et un oeil de chaque côté. Elles subissent une véritable transformation : le corps s'arrondit, le ventre prend du volume, l'un des yeux et la bouche migrent d'un côté à l'autre. La larve cesse alors de nager pour aller se poser au fond de l'eau, sur le flanc désormais aveugle. Le processus se termine par la dépigmentation de ce côté et l'aplatissement du poisson.
Alevins de turbot
Turbot
Du têtard à la grenouille
La métamorphose de la larve des grenouilles, le tétard, semble résumer la conquête de la terre ferme par les poissons il y a 350 millions d'années. Le tétard est nageur et purement aquatique. Il respire grâce à des branchies d'abord externe, puis internes. Il se repère dans son environnement au moyen du même organe que les poissons, la ligne latérale. En grandissant, il se dote d'une, puis deux paires de pattes. Finalement, il se métamorphose en une grenouille miniature qui respire par les poumons et la peau. La larve des salamandres et des tritons respirent grâce à des branchies externes. Elle quitte l'eau pour se métamorphoser à l'âge de 2-3 mois. Mais certaines larves ne se transforment pas. C'est le cas de l'axolotl, un amphibien cavernicol mexicain, dont les laves grandissent et se reproduisent sans jamais passer au stade adulte. On appelle ce phénomène la néotenie.
Tétard
Rainettes aux yeux verts
Larve de triton crêté
Triton crêté
Larve de salamandre tachetée
Salamandre tachetée
Axolotl