Les mécanismes de la locomotion dans l'eau
Je dédie cet article à Da.cl.
Nager et ne pas couler
Pour flotter et nager sous l'eau, les animaux jouent avec leur volume et avec leur densité. Leurs formes hydrodynamiques leur permettent d'avancer avec une étonnante aisance.
Ce colvert femelle flotte parce qu'il est moins dense que l'eau. La poussée d'Archimède, maximale, l'empêche de couler. Pour plonger, il lui suffit de chasser l'air de ses plumes.
Le canard colvert a beau faire son poids, il ne coule pas. Il lui suffit de s'ébrouer pour que son plumage se gonfle - il est d'ailleurs imperméable - et emprisonne l'air comme le ferait une bouée. Le plumage ainsi gonflé, le colvert augmente son volume et diminue sa densité, qui est alors inférieure à celle de l'eau. Il flotte.
Du bon usage de la bouée
Lorsque le canard avance sur l'eau, il flotte en parfait équilibre, déplaçant exactement le volume d'eau correspondant à son poids. Un canard de 1 kg déplace 1 litre d'eau. Veut-il plonger? D'un coup de rein vigoureux, il s'enfonce sous l'eau. La pression chasse l'air emprisonné dans ses plumes: notre canard à dégonflé sa bouée. Sa densité a augmenté et s'est rapprochée de celle de l'eau: il est presque à l'équilibre et il lui suffit d'un effort minime avec ses palmes pour se maintenir sous l'eau. Dès qu'il remonte à la surface, il gonfle ses plumes. Sa bouée à nouveau pleine, il nage sans effort.
A chacun sa technique
Il s'agit ensuite d'avancer. Les animaux aquatiques doivent composer avec trois paramètres - leur force de poussée, la résistance de leur corps et leur capital énergétique - pour nager sans s'épuiser. C'est ainsi que les poissons ont évolué de trois manières différentes. Il y a des spécialistes de la nage au long cours (les thons), d'autres de l'accélération fulgurante (les barracudas), d'autres enfin de la manoeuvre (les poissons-papillons). Mais la majorité d'entre eux n'est pas spécialisés.
Thon blanc
Thon rouge du Pacifique
Le fuseau et la faucille
En terme d'efficacité énergétique, les grands pélagiques (poissons de pleine mer) sont les plus remarquables. Surtout les thons. Leur corps aplati en forme de fuseau parfaitement symétrique glisse dans l'eau sans résistance: il est hydrodynamique. Leur queue, une faucille très mince de grande envergure rattachée au corps par un fin pédoncule, peut les propulser à une quizaine de kilomètres par heure pendant des jours, sans consommer beaucoup d'énergie à chaque battement. Piètres manoeuvriers, mauvais sprinters, ils fondent sur leurs proies sans s'épuiser. Le requin mako, autre grand pélagique, est nettement moins efficace. Il nage en ondulant de presque tout le corps, alors que le thon n'agite que sa queue. Il dépense donc plus d'énergie et se déplace plus lentement, mais reste capable d'accélérations fulgurantes.
Char d'assaut et capsule spatiale
Cela n'est rien, cependant, à côté d'un animal comme le barracuda (ou du brochet). Ce poisson manoeuvre comme un char d'assaut, mais est capable d'accélérations foudroyantes que lui permet une queue massive reliée au corps sur une base très large: en un coup de nageoire, il propulse tout son corps, mais dépense beaucoup d'énergie.
Le poisson-papillon vit dans le corail, milieu où il est très difficile de circuler. Son corps, court et ovoïde, peut basculer à la moindre poussée des nageoires pectorales, qui oscillent très vite autour du centre de gravité - de la même manière qu'une capsule spatiale, qui peut maneouvrer sur les trois axes sans avancer ni reculer.
Brochet
Poisson-papillon jaune
Les poissons-papillons vivent dans les coraux. Leur corps est un peu comme un oeuf qui bascule à la moindre poussée.
110 km/h
Tours les animaux marins, confrontés à la résistance de l'eau, ont évolué dans les mêmes directions. Les requins pélagiques, les dauphins et les baleines, mammifères de haute mer, mais aussi les manchots, ont globalement la même forme hydrodynamique. Ce sont cependant les poissons-voiliers qui se sont le mieux adaptés: pour éliminer toujours plus de turbulences lors de leurs déplacements, la mâchoire supérieure de ces poissons s'est allongée en forme d'éperon. La résistance que l'eau leur opose est minimale et leur vitesse, maximale: plus de 110 km/h en pointe pour le marlin et 50 de moyenne....
Marlin
Manchots à aileron blanc
Dauphin sombre
Marcher sur l'eau
Certains animaux marchent sur l'eau: des insectes comme le gerris ou l'hydromètre et un grand lézard d'Amérique du Sud, le basilic, surnommé d'ailleurs lézard Jésus-Christ! Incapable de modifier leur densité comme les poisson ou les oiseaux aquatiques, ils s'arrangent pour répartir leur faible poids sur le plus d'espace possible, ce qui diminue la pression qu'ils exercent à la surface de l'eau. Or, entre l'eau et l'air, la surface joue le rôle d'une peau: la tension superficielle confère à la surface de l'eau une rigidité suffisante pour supporter une pression inférieure. Même un animal de poids comme le basilic parvient alors à marcher sur l'eau, grâce à ses pattes pourvues de doigts très long qui se répartissent la pression qu'il exerce.
Basilic
Gerris
Hydromètre
Requin pèlerin